lundi 8 février 2010

Bloguer...oui mais pourquoi ?

Quelle devrait-être la fonction d'un blog ? Chacun évidemment est libre de faire ce qu'il veut de son espace d'expression mais ne devrait-il pas idéalement se positionner comme une alternative aux médias traditionnels - qu'ils soient généralistes ou spécialisés - tels que presse, radios, émissions de télévision ? On peut également inclure dans cette catégorie certains sites web, dont le mode de fonctionnement ne diffère pas énormément des moyens précités.

Quelle est donc la grande différence entre ces médias et les blogs ? Elle est évidente selon moi : ces derniers supposent une certaine liberté d'écriture, vu que le contenu d'un blog n'engage, en principe, que son auteur. Cela veut dire qu'il a tout à fait le droit de laisser exprimer sa subjectivité par rapport aux sujets abordés. Mais c'est là que le bât blesse ! Quels sont les blogs qui saisissent réellement cette opportunité ? Sans chercher ici à me faire des ennemis, force est de constater que beaucoup d'entre eux se "contentent" de parler musique de manière plutôt convenue, nouveauté après nouveauté, chronique après chronique. D'ailleurs, à quoi sert-il de passer son temps à chroniquer un disque alors qu'il est désormais aisé pour un internaute de l'écouter soi-même en ligne, et se faire ainsi son propre avis ? Et l'écoute d'un disque sans achat préalable semble une pratique qui est entrée dans les mœurs aujourd’hui, jusqu'aux maisons de disque elle-même, qui semblent l'encourager. Rares sont ainsi les artistes qui ne proposent par leur album en streaming (limité, soit) aux alentours de leur date de sortie. Le "Luisterpaal" ici à droite peut en attester, ainsi qu’autres Deezer ou MySpace.

Vous me direz que pour amener l'internaute à jeter une oreille sur une nouveauté, il faut des incitants. Et que les chroniques de disque, sur le net ou autres, participent à cette fonction. Cela est tout à fait vrai, mais j'aurais tendance à penser que c'est surtout le cas pour des blogs "reconnus", dans le sens où leur auteur peut être considéré comme un "leader d'opinion" (un concept de Lazarsfeld qui devrait rappeler à certains leurs chères études en communication). Qui sont ces blogueurs ? L'indice qui ne trompe pas pour les reconnaître tient tout simplement au nombre de commentaires que récoltent leurs billets. Lorsque Thom du Golb ou GT d'Art-Rock parlent d'un disque, ils n'ont peut-être pas le nombre de visiteurs d’un site spécialisé comme celui des Inrocks, mais ils sont suivis par une "communauté" fidèle de lecteurs, qui s'ils voient un disque encensé sur ces blogs se disent qu’il vaut certainement la peine d’y jeter ne serait-ce qu’une oreille. Ces blogueurs sont également supposés être indépendants (pas d’éditeurs ou de maisons de disque qu’il ne faut pas froisser, pas de jeux promotionnels "win-win"...). On leur accorde donc un crédit plus ou moins important qui leur permet de disposer d'une influence non négligeable dans la sphère de leur lectorat.

Mais ce n'est pas le cas de tous les blogs évidemment. Si moi-même je publie une chronique de disque, je ne dispose pas de cette légitimité, tout simplement parce que je n'ai pas encore "fait mes preuves", dans le sens où mes quelques billets isolés ne permettent certainement pas aux lecteurs de se forger une opinion arrêtée sur le crédit à m'accorder (ou non). Je pense qu'il en va de même pour de nombreux blogs, qui en écrivant leurs chroniques de nouveautés de manière linéaire et isolée, prêchent en quelque sorte malheureusement dans le vide.

Il existe selon moi deux pistes à suivre pour se sortir de cette situation. Une des solutions est tout simplement de rejoindre un site, qui lui possède une certaine légitimité que le lecteur ne remettra pas en question. L'exemple du site "Dans le mur du son" est éloquent en la matière : ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit, les rédacteurs sont loin d'être des novices mais voici un bon exemple de blogueurs qui ont décidés de s’associer parce qu’ils ont pris conscience que leurs chroniques gagneraient en écho si elles étaient publiées sous la même bannière. Une expérience qui me semble tout à fait réussie vu que dans mon cas je lis toutes leurs chroniques avec un même intérêt, sans me soucier de qui les a écrites (sauf bien évidemment quand je suis un désaccord !).

La deuxième piste consiste quant à elle à trouver une approche originale dans la manière de parler de musique. C’est un passage obligé pour presque tout le monde, hormis les quelques rares personnes qui peuvent se permettre de compter uniquement sur la qualité de leur prose pour passionner leur lectorat. Il s’agit donc de trouver un angle d'attaque qui permettra d'accrocher le lecteur. Moi-même je dois avouer qu’après le manque de temps, il s'agit de la raison principale qui m'empêche de publier souvent sur ce blog : je ne souhaite pas répéter ce que certains « collègues » ont déjà fait avant moi, surtout si c’est pour le faire en moins bien. Malheureusement trouver à chaque fois une approche qui sort de l’ordinaire est loin d’être évident...

Et pourtant pas mal de blogs relèvent ce défi avec succès. Sans pouvoir les citer tous, voici quelques exemples de blogs réussis, bien qu’assez différents dans leur genre. Chez Art-Rock (de nouveau), la musique est évoquée de manière plutôt érudite, chez Kill me Sarah, elle accompagne un journal de bord passionné et passionnant. On peut aussi décider d'évoquer la musique avec plus de légèreté, comme Coolbeans (A Tombouctou sans Mariachi) et son exploration alphabétique de discothèque et les petits jeux qui vont avec. Et finalement des formules très simples, comme proposer un nouveau morceau par jour (I Left Without My Hat), peuvent également se révéler d’une efficacité redoutable.

En bref, ces idées sont prises, il va donc falloir en trouver d'autres. Moi-même je cherche encore (si vous avez des suggestions...). C'est pour ça que je ne vous parlerai pas encore tout de suite des sorties de ces dernières semaines, en attendant les concerts ou une quelconque bonne idée avant de m’y mettre. Finalement, il ne faut pas oublier que le plus important reste avant tout de se faire plaisir : si c'est le cas, le lecteur devrait également pouvoir y trouver son compte.

7 commentaires:

  1. C'est intéressant tout ce que tu dis, notamment le passage où tu parles de "faire ses preuves". Je me suis déjà posé la question concernant mon propre cas, mais de manière évidemment différente puisque quand cela m'a effleuré j'avais déjà un bon "socle des lecteurs", je ne me suis donc pas dit de choses comme "alors, comment je vais faire mes preuves ?", mais plutôt "j'ai dû faire mes preuves puisque désormais on accorde un vrai crédit à ce que je raconte".

    Par contre je ne me suis jamais posé la question en tant que lecteur des autres. Mais c'est pour raison assez stupide (enfin dans un tel contexte) : en fait j'aime la prose. Ce qui motive l'existence de mon blog (comme de toutes mes collaborations extérieures) c'est avant tout le plaisir d'écrire et, par extension, de lire les autres. Je ne suis d'accord que très épisodiquement avec KMS, par exemple, en terme de goût, mais c'est un bonheur de lire tous les jours ou presque. Je dis ça pour lui parce que tu en parles, je pourrais le dire pour plein d'autres.

    Pour la question du positionnement, c'est un peu différent. Je crois qu'elle se pose surtout quand on participe (comme moi) à des webzines. Moins pour le blog en tant que tel.

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  2. Vouloir faire ses preuves, c'est en effet souvent un processus inconscient je suppose. Si pour toi (et d'autres blogueurs), l'écriture vient facilement (cela se voit au niveau du nombre de publications), ce n'est bien sûr pas le cas de tous les blogueurs, qui n'ont peut-être pas moins d'idées à défendre mais qui ont sans doute plus de mal à les coucher par écrit...Et c'est là un handicap certain lorsqu’on désire s'exprimer sur tous les sujets qui nous intéressent : les chances de bien faire "passer" ce que l’on ressent se réduisent et donc bon nombre d’articles risquent de n’être ni intéressants pour le blogueur à la rédaction, ni pour l’internaute à la lecture.
    Dans mon cas par exemple, j'ai décidé de sélectionner ce qui semble m'inspirer le plus (mais je reconnais être un grand paresseux pour ce qui est de bloguer), par « peur » d’être ennuyeux. Ce qui est peut-être un tort vu que je passe certainement à côté de choses qui mériteraient d’être défendues, mais soit, ce n’est que le début d’un cheminement ;)
    Et il est heureux que des gens comme toi ou KMS ne se privent pas d’écrire (je lis quelques magazines culturels mais je pourrais difficilement me passer de ces billets de blog qui en s’exprimant sur un même sujet le font de manière bien plus passionnante).

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  3. J'aime bien ta conclusion, "l'essentiel est de se faire plaisir"... Ça m'parait etre une bonne motivation pour blogguer. :)
    Après, c'est juste une question de feeling entre toi et tes lecteurs, il y a de la place pour tout le monde, tant les visiteurs sont différents...

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  4. Pourquoi on écrit? Pourquoi on publie? qu'est-ce qui pourrait me distinguer des autres? Ce sont de vraies belles grandes questions. On ne peut jamais y répondre que de façon personnelle. Je voudrais donc juste apporter quelques commentaires.

    Ce qui motive un bloggeur en général, c'est le plaisir d'écrire, de partager, et je pense que cette motivation est souvent suffisante pour que la toile soit alimentée de façon continue.

    Pour ce qui est de la légitimité et de faire ses preuves, c'est une question encore une fois bien subjective. Souvent j'ai eu à répondre à des "de quel droit?". Mais si ça arrive dans la vraie vie, cette question se pose moins sur la toile.

    Les blogs collectifs, j'ai déjà donné. Tout d'abord avec radiolibre, où du jour au lendemain, et grace à Jérome Colin, j'ai décuplé mon nombre de lecteurs quotidiens. Et puis c'est parti en sucette, notamment parce que certains avaient oublié qu'un site, c'est plus de discipline que de talent véritable. J'ai arreté pour me recentrer sur mescritiques, où l'attente est minimale.

    Et puis il y a listen2fight, qui a prouvé qu'on pouvait trouver un angle d'attaque différent. Et faire dans le blog collectif.

    Bonne chance dans ton questionnement. On viendra te lire de toute façon.

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  5. @ 2ben : C’est bien résumé et cette question de feeling est importante : si on se sent bien dans son activité de blogueur, ça transparait bien évidemment lors de la lecture. Les blogs ou le Net en général offrent à chacun une chance inouïe de s’exprimer. A partir de là, on est libre de choisir ce qui nous intéresse et ce qu'on a envie de lire et de découvrir.
    @ Marc : Tu as bien compris que le questionnement était plus global et je suppose que tous ceux qui écrivent sur Internet doivent se poser ce genre de questions au moins une fois. Je te rejoins aussi sur cette question de motivation. Pour ce qui est de la légitimité on peut l’avoir uniquement lorsque ce que l’on écrit tient un minimum la route et c’est évidemment très subjectif comme tu dis.
    Oui Radiolibre, d’une belle idée au départ, n’a malheureusement pas tenu ses promesses. C’est évidemment plus difficile d’instaurer une discipline entre collaborateurs « virtuels » que de s’occuper de son propre blog. C’est un des avantages dont je parlais : on utilise cet outil comme on le souhaite et c’est là que je trouve qu’il faut s’efforcer de donner une personnalité à son blog pour pouvoir le distinguer de la masse. C’est d’ailleurs ce que j’aime dans tes chroniques, qui sont souvent très juste et passionnées (on a des goûts assez proches ça aide aussi !) et qui sont toujours un plaisir.
    Bonne continuation également ;)

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  6. Outre le fait qu'on finira tous par être d'accord que l'important c'est de se faire plaisir, le point intéressant que tu soulèves est comment exploiter cette liberté liée au statut de blogueur. Perso, j'aime bien l'idée de faire un travail similaire à celui d'un webzine, mais à ma façon avec des textes parfois plus littéraires, parfois plus coup de gueule. Alors oui, il faut bien avouer que dans un sens je me "contente" de parler musique de manière plutôt convenue, nouveauté après nouveauté, chronique après chronique. Mais bon les choses me vont bien comme ça, j'écris ce que je veux et j'ai un lectorat suffisant pour savoir que mes textes ont un impact (faible mais un impact quand même). Et puis au final, c'est quasiment impossible de parler musique sans être à un moment ou un autre "convenu".
    ++ :)

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  7. Chez toi, comme chez Marc ou Thom, les chroniques sont souvent très personnelles et vu qu'elles sont bien écrites je ne pense pas qu'un leitmotiv soit nécessaire. Quand on y pense c'est d'ailleurs une performance de pouvoir passionner des lecteurs en parlant de musique, qui est a fortiori un sujet moins concret qu'un film ou un livre, où l'aspect narratif permet de raconter quelque chose de différent à chaque fois. C'est donc loin d'être une sinécure comme tu dis. Bonne chance pour la suite ;)

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