samedi 27 juin 2009

French Bowie


Bien que David Bowie n'aie plus vraiment d'actualité depuis quelques années (son dernier album, "Reality", date déjà de 2003), rien ne nous empêche de l'aborder sur ce blog sous un angle un peu particulier, en l'occurrence son rapport à la chanson française, sans prétention d'exhaustivité.

Comme ça se faisait encore à l'époque, Bowie a repris quelques-uns de ses classiques en langue étrangère. Il existe par exemple une version italienne de "Space Oddity", intitulée "Ragazzo Solo, Ragazza Sola", transformant ainsi l'épopée du Major Tom en une histoire d'amour). Et comme vous l'avez vu en illustration de ce billet, le titre "Heroes" n'a pas seulement eu les honneurs d'une version allemande, (ce qui fut également le cas pour le titre "Love you 'till tuesday") mais également d'une variante française, plus méconnue, que je vous livre ici:

David Bowie - Héros (plus disponible)

Inversons maintenant le processus, avec une relecture d'une chanson française par Bowie himself. Ce ne sera pas une découverte pour la plupart d’entre vous : en 1973, le chanteur reprenait « Amsterdam » de Jacques Brel en face B de son single « Sorrow » (à voir : le clip où figure cette chère Amanda Lear). Le morceau original (dont il n'existe pas de version studio apparemment) bénéficiait d’une instrumentation plutôt luxuriante et qui allait crescendo, de l'introduction à l'accordéon au final orchestral. Scott Walker l'avait reprise également sur son premier album dans une adaptation assez fidèle à celle de Brel.

Bowie choisit quant à lui de se tenir davantage à la moëlle du morceau, qui en devient une ballade folk où il se fait accompagner à la guitare par son compère Mick Ronson. S'il est bien évidemment risqué de se mesurer au grand Jacques, on peut dire que l'entreprise est plutôt une réussite. Le chant de Bowie est convaincant et on se retrouve face à un morceau que l'on croyait connaître par cœur, mais qui réussit encore à nous surprendre.

David Bowie - Amsterdam (plus disponible)

Et finalement, quel artiste français peut se targuer d’avoir repris une chanson de David Bowie ? Pas beaucoup me semble-t-il mais quelques recherches m’ont permis d’en retrouver deux, plutôt oubliées. Il y a d'une part Alain Kan avec « La vie en Mars » (sic), que je vous laisse découvrir sur le blog du Grand Panda, et qui je pense se passe de commentaire. (si ce n'est que sa bio me semble plus intéressante que la reprise en question).
Plus réussie, cette version de Gérard Palaprat de "Space Oddity", intitulée « Un homme a disparu dans le ciel ». Bien sûr le morceau n'échappe pas au kitsch (les paroles supportent mal la traduction et le chant, surtout dans la première partie, irrite un peu) mais je lui tire mon chapeau pour le travail effectué, comme le décompte introductif en russe ou encore le solo de guitare final épique, chose somme toute assez rare dans la variété française. En résumé, un petit bijou méconnu qui mérite certainement d'être découvert et réhabilité, au premier comme au second degré.


PS: Je m'en voudrais, bien que ce soit un peu hors-sujet, de ne pas évoquer le meilleur medley de Bowie, qui ne contient pourtant aucune de ses chansons originales : j'ai nommé le fameux "Bowie's in Space" des Flights of the Conchords, à voir en images ici.

PS2: en prolongement de ce post, le blog It's Only Rock'n Roll...But I Like It évoque les premiers contacts de Bowie avec les Français, avec en prime une interview assez maladroite du Thin White Duke par...Michel Drucker! A lire ici.

dimanche 21 juin 2009

Dans les chaussures de Shane Meadows...

J'avoue avoir toujours été un peu jaloux des Anglais : leur nation peut être vue comme un des deux berceaux du rock, leur sens de l'humour a rarement été égalé, leur football également... Passé ces quelques considérations quelque peu réductrices, il est un autre art où les Britanniques excellent et que l'on évoque bien moins souvent : le cinéma. Je pense plus particulièrement au mouvement enclenché dans les années 60, que l'on peut qualifier de « réalisme social » et que Fluctuat retrace pour nous.

Non seulement le genre existe toujours mais il semble même connaître un second souffle ces dernières années. Il y a d'une part les vétérans, dont certains sont toujours actifs : on pense bien sûr à Ken Loach qui nous a gratifié ces dernières années de quelques films marquants, tels que « The Wind that shakes the Barley » (« Le vent se lève ») ou très récemment « Looking for Eric », une fable qui mélange avec justesse humour et critique sociale, dotée d'un final jouissif comme on n'en avait plus vu depuis longtemps au cinéma. Et puis il y a la nouvelle génération, avec en tête de file de ce phénomène de renaissance du film social à l'anglaise, le réalisateur Shane Meadows. Je n'ai pas vu tous ses films mais son dernier, « This is England », qui évoquait l'histoire d'un jeune garçon enrôle par les Skinheads, m'avait fait forte impression. Cette semaine c'est par hasard que je suis tombé sur « Dead Man's Shoes », un film qu'il a réalisé en 2004. Je ne suis même pas sûr qu'il ait été programmé sur nos écrans à l'époque mais sa sortie ce mois-ci en DVD nous donne une bonne occasion d'en parler, et de se rattraper.

Pour ne pas gâcher l'effet de surprise, disons simplement que l'on suit la quête d'un ancien soldat, revenu dans son village d'enfance après de nombreuses années pour se venger...mais de quoi ?

Comme pour « This is England », le réalisateur a opté pour un tournage proche du genre documentaire : la région des Midlands y est dépeinte de très belle manière et Meadows parvient à sublimer des paysages et des villages très désolants à la base. Il privilégie également dans ses films des acteurs non-professionnels ce qui lui permet de compter sur une plus grande spontanéité de leur part, voire de jouer sur l'improvisation lors de ses tournages (quelques indications sur son cinéma dans cette interview). Quant à la trame du film, a priori assez classique, elle se révélera bien moins linéaire qu'il n'y paraît...

Pourquoi parler cinéma sur un blog voué à la musique me demanderez-vous? Tout simplement parce que la bande son du film est elle aussi exceptionnelle, avec des morceaux de Smog, Bonnie Prince Billy, Gravenhurst...ou encore Aphex Twin et Laurent Garnier. Une sélection, publiée chez Warp, qui laisse indéniablement autant de traces que les images du film et qui nous prouve une nouvelle fois le bon goût du réalisateur. Difficile de faire une sélection (on aurait pu retenir les instrumentaux de Calexico - « Untitled 2&3 » - thèmes récurrents du film), mais je vais choisir de faire simple avec le générique de fin, un titre on ne peut plus approprié de M.Ward :

M.Ward – Dead Man (plus disponible)

Quant à mon autre choix il s'agit simplement d'une découverte que j'ai faite grâce à Shane Meadows : le groupe Clayhill, plutôt inconnu de ce côté-ci de la Manche :

Clayhill – Afterlight (plus disponible)

Et je ne résiste pas au passage de vous livrer un autre de leurs titres en bonus, déjà présent sur la BO de « This is England », et qui est une très belle reprise de ce classique des Smiths :

Clayhill – Please, Please, Please, Let me get what I want (plus disponible)

Meadows sortira fin juillet un nouveau film, « Shames Town », une comédie prometteuse à en juger par sa bande-annonce.

Quatre de ses films sont repris dans ce coffret, qui me semble tout à fait incontournable (et que personnellement je ne vais pas tarder à commander !).

mardi 9 juin 2009

Trio gagnant

Mes habitudes d'écoute sont marquées par des phases, de durée et d'intensité variables, au cours desquelles je me concentre sur un groupe ou un artiste en particulier. Je suis par exemple sorti récemment d'une période de redécouverte de l'œuvre de Neil Hannon (la faute à Coolbeans) pour me consacrer plus pleinement à la discographie de Bob Dylan, circa 1963-1969 (où il n'est d'ailleurs question que de chefs d'œuvres). Il faut reconnaitre qu'il est très agréable de se laisser porter de la sorte au gré de musiques qui nous ont totalement conquises.

Il y a néanmoins un revers à cette médaille : le sentiment coupable de passer à côté de nouveautés intéressantes dont il est question dans les magazines musicaux (le toujours très recommandable Rif Raf par exemple : gratuit en pdf!) et plus généralement dans les blogs et webzines. Si je suis toujours à l'affut des nouveautés intéressantes, je peux difficilement affirmer être à la pointe en ce qui concerne les dernières sorties. Je reste d'ailleurs toujours fasciné par la capacité de digestion musicale de certaines personnes alors que je ne parviens quant à moi qu'à me plonger que dans quelques nouveautés tous les mois.

Comme vous pouvez le voir ci-contre, quelques disques récents se sont tout de même imposés à moi dernièrement. Vu que je me sens un peu trop paresseux que pour pondre un long billet sur ces disques de manière individuelle, je vais tenter de m'en tenir à quelques lignes qui reflètent mon avis général sur ceux-ci. J'y joins, comme d'habitude, des liens vers des chroniques bien plus exhaustives que moi à leur sujet.

La troisième marche de mon top personnel est occupée par Rodriguez pour un disque qui nous arrive avec un peu de retard (37 ans tout de même!). Passé encore plus inaperçu à l'époque que son indispensable « Cold Facts », « Coming from Reality » est le second et ultime album du troubadour. Si ce disque est hautement recommandé aux fans de son premier essai, les autres auront plutôt intérêt à faire l'apprentissage dans l'ordre. On n'y retrouve malheureusement plus de classiques instantanés comme l'était « Sugar Man » bien que les morceaux soient solides pour la plupart, explorant le meilleur de ce que la fin des sixties pouvait nous proposer en matière de folk ou de pop psychédélique. A noter aussi que le disque contient 3 titres supplémentaires et un livret très complet, comme les autres rééditions de l'impeccable label Light in the Attic, qui nous offre également un extrait du disque:

Rodriguez - Heikki's Suburbia Bus Tour


En 2, je me dois d'évoquer le cas de Jason Lytle, la force créative derrière les regrettés Grandaddy, un groupe qui avait le chic l'air de rien de trousser de sacrés morceaux qui font date aujourd'hui dans le petit monde de la pop indé. Monsieur Lytle a attendu 4 ans quant à lui pour nous revenir en musique, avec cet album intitulé « Yours,Truly, the Great Commuter ». Ce retour se révèle discret mais plutôt gagnant à mon goût. Teinté de mélancolie, le disque contient quelques pépites qui raviront les fans d'antan mais qui devraient également pouvoir en convertir d'autres tant l'ensemble se révèle lumineux. S'il n'évite pas quelques écueils (« Brand New Sun » : le genre de morceau déjà entendu en mieux, « It's the weekend » : une rengaine débile chantée sur une guitare saturée et un riff de synthé horripilant) , j'avoue me laisser prendre au jeu de la voix si caractéristique du bonhomme et à ses arrangements quelques peu kitsch (remember ELO?) avec beaucoup de bonheur. Un disque sans prétention mais qui devrait ravir vos oreilles printanières.

4 autres chroniques de cet album sur ce chouette site.

Recommandation personnelle : ce qui marche très bien sur disque peut se révéler d'un ennui profond sur scène : je ne pense pas que les spectateurs qui ont assisté au concert de Jason Lytle il y a quelques semaines au Botanique me démentiront.

Une chanson ici:

Jason Lytle - Ghost of my Old Dog (plus disponible)


En haut du tableau, le grand méchant ours: j'ai nommé Grizzy Bear !!! Grand grand disque, que dire d'autre? Plus abouti que le déjà bien foutu « Yellow House », on ne peut pas reprocher grand chose à un album de cette trempe, sinon qu'il lui manque peut-être un titre de la grandeur de « Knife », qui reste à mon goût un des meilleurs morceaux de cette décennie. Voilà un groupe qui sait faire preuve d'inventivité, ose expérimenter tout en réussissant à rester accessible et qui parvient par moment à tutoyer la grâce comme pouvaient le faire les Beach Boys des grands jours (« Two Weeks »). J'ai lu que "Veckatimest" était un peu leur « Ok Computer », il est un peu tôt pour le dire mais il faut lui reconnaître des qualités qui lui donnent une bonne longueur d'avance pour le titre de « meilleur album de l'année ».

Quelques avis en vrac et un titre sur le site du groupe:

Grizzly Bear - Cheerleader

Pour faire votre shopping :

Rodriguez - Coming from Reality

Jason Lytle - Yours Truly, the Commuter

Grizzly Bear - Veckatimest